La Pologne a bénéficié de fonds importants de l’UE pour financer ses grands projets. Elle engrange surtout les bénéfices d’une décennie de réformes, d’un système bancaire sain et d’une politique d’endettement stricte. Cette série est publiée sur notre site avec l’aimable autorisation du journaliste Stéphane Laugée que nous remercions très chaleureusement.

L’industrie et la construction, remparts contre la récession

Depuis la fin des années 90 et la transformation économique, d’autres secteurs ont été dynamisés. L’industrie est aujourd’hui l’une des chevilles ouvrières du bon équilibre économique polonais. Un renouveau que la Pologne doit en partie aux investisseurs étrangers, mais aussi à son marché intérieur riche de nombreuses PME dynamiques. L’industrie florissante a permis au pays d’échapper à la crise et à la récession entre 2008 et 2009. Un peu en retrait du fait de la bulle immobilière de 2007, la construction et le BTP ont un avenir prometteur. Les besoins en logement garantissent une croissance régulière à long terme.

Mécanique, industrie : les fleurons nationaux

Le tissu industriel polonais se caractérise par une forte proportion de petites et moyennes entreprises sur l’ensemble du pays. Avec des secteurs phares : 70 % des importations en provenance de la Pologne sont d’origine électromécanique, chimique ou encore agroindustrielle. Henryka Bochniarz, présidente de PKPP Lewiatan, la Confédération polonaise des employeurs privés, l’observe au quotidien dans son réseau. L’industrie polonaise est au beau fixe ; une situation qui attire de nombreux investisseurs. « Qui viennent d’un peu partout dans le monde, même la Chine s’intéresse de plus en plus à notre pays. Toutes les grandes sociétés japonaises ont installé des filiales ici ». L’automobile, l’électroménager, l’audiovisuel, allemands, japonais, chinois ou coréens ont investi dans des unités de production pour être réactifs sur le marché européen. Ils bénéficient du bon rapport qualité-prix de la main d’oeuvre locale, au salaire quatre fois inférieur au salaire Français. Un marché prospère pour les grandes compagnies, un peu moins pour les entreprises de taille plus petite, comme nous l’explique Henryka Bochniarz : « C’est facile pour de grandes sociétés de s’établir ici, ils ont des avocats, etc. Mais pour les sociétés plus petites, ça devient plus difficile parce que l’administration polonaise est complexe. Le système judiciaire est efficace mais trop lent. Il faut compter au moins 3 ans pour récupérer le moindre centime engagé dans un procès ».

Les lenteurs administratives sont un point négatif sur lequel la Pologne doit encore travailler. « L’environnement pour le secteur privé est très amical, mais il nous reste de mauvaises habitudes du système précédent, particulièrement dans l’administration. Pour eux, « économie » signifie « propriété de l’Etat ». 75 % du PIB se joue dans le privé mais les plus grandes sociétés sont toujours contrôlées par l’Etat, qui évolue au gré des élections. « Cela ne facilite pas la continuité dans la gestion de ces sociétés », avoue la présidente de PKPP Lewiatan.

Un pays en construction

Malgré une petite crise en 2008-2009, le secteur de la construction se porte bien, notamment la construction de bureaux depuis l’année dernière. Les besoins sont importants et nombreux sont les investisseurs qui ont déjà vu en Pologne de bien meilleures opportunités de rendement que dans les grandes économies d’Europe de l’Ouest.

Dans le résidentiel, un des projets phares du moment, Zlota 44 de la société Orco, fondée par Jean-François Ott innove en créant la tour d’habitations la plus haute d’Europe centrale à Varsovie, avec des prestations très haut de gamme. Cependant, l’immobilier résidentiel est maintenu à des prix bas, en partie à cause de taux d’intérêts élevés. Ce marché rappelle la France des années 90, l’éclatement de la bulle de 1993 et la baisse qui suivait, avec son lot de bonnes affaires.

Mais la croissance du secteur emprunte aussi le chemin inverse, de la Pologne à l’Ouest. Les constructeurs polonais exportent leur savoir-faire à l’Ouest. Numéro 2 mondial dans la fabrication de fenêtres de toit, Ryszard Florek, fondateur de FAKRO, compte bien percer davantage sur les marchés occidentaux.

Widok z Towarowej na centrum Foto: Jakub Obuch

Widok z Towarowej na centrum – Foto: Jakub Obuch


jerzy_starak_-_malyPortrait: Polpharma – Jerzy Starak, entrepreneur polonais de la première heure

Venant de l’industrie des biens de consommation, quelle était votre vision, lors de la reprise de Polpharma en 2000, jusqu’à en faire l’actuel leader polonais de l’industrie pharmaceutique ?

Quand j’ai repris Polpharma en 2000, c’était un acteur de l’industrie pharmaceutique polonaise, avec certes un grand potentiel, mais avec un service commercial embryonnaire et un management peu dynamique. Mon objectif était de créer une société moderne et dynamique capable de concurrencer les grandes sociétés étrangères implantées dans le pays en produisant d’après un respect strict des standards d’excellence internationaux.
Afin d’y arriver, il fallait mettre en place des process innovants et appliquer les standards d’excellence à tous les niveaux de production. Nous avons donc investi dans l’IT, dans le développement de nouveaux produits, et nous avons développé l’une des équipes commerciales et marketing les plus efficaces du marché. Cela a demandé du temps et de la détermination, parfois au prix de décisions difficiles.
A ce jour, Polpharma est le leader incontesté sur le marché pharmaceutique polonais. Nous bénéficions de la confiance de nos chercheurs, patients et partenaires. Nous avons l’un des plus grands centres de R&D de l’Europe centrale. Notre portefeuille est en forte augmentation avec plus de 300 produits actuellement et 400 en cours de développement. Nous lançons aussi des dizaines de nouveaux produits à l’étranger chaque année. 12 ans plus tard, je suis très fier de notre stratégie de développement car elle s’avère avoir été la bonne. Nous sommes aujourd’hui la société la plus innovante en Pologne d’après le classement de l’institut Economique de l’Académie Polonaise des Sciences et le MSN Scientific Network.

– Nouvelles acquisitions : Polfa Warszawa, Cenovapharma, Herbapol, Chimpharm, Bioactive, Polfa Warszawa… On dit que vous êtes pris d’une “fièvre d’acquisitions”, allez vous continuer en 2012 – 2013 ? Où vous voyez- vous dans 5 ans ?

C’est dans les acquisitions que s’exprime la stratégie de Polpharma : devenir le leader en Europe centrale, de l’est et en Asie centrale. Nous avons fait un grand pas dans ce sens en 2011. Tout d’abord le leader Kazak de l’industrie pharmaceutique, Chimpharm, a rejoint notre groupe. Polpharma a aussi pris une participation majoritaire dans le groupe russe Akrikhin et dans la société de distribution turque Cenovapharma. Nous avons l’intention de renforcer notre présence en Turquie à la fois par de nouvelles acquisitions et de façon organique ; ce marché représente un formidable potentiel en même temps qu’un tremplin vers les nouveaux marchés du Moyen-Orient, d’Afrique, voire de la mer caspienne. Enfin, en 2012 Polpharma a fait l’acquisition de Polfa Warszawa, l’une des sociétés majeures de l’industrie. Dans un avenir proche, nous allons nous concentrer sur l’intégration de ces nouvelles acquisitions dans le groupe, en augmentant les synergies et l’efficacité de notre coopération. Nous souhaitons aussi nous développer dans la bio-technologie. Grâce à la construction de notre laboratoire de pointe en R&D dans le Parc des Technologies et des Sciences de Gdansk, nous allons travailler sur des médicaments Bio-similaires, bio-génériques et bio-innovants.

– Futur : envisagez-vous d’investir dans d’autres domaines, à court ou long terme ?

Outre notre activité principale dans les médi-caments génériques ou bio, Polpharma est également présent sur le marché des herbes médicinales et d’aliments bio comme le thé, des boissons et sirops avec Herbapol, basé à Lublin. 2011 a d’ailleurs marqué une avancée significative dans cette activité avec la reprise de Bio- active, un producteur de thé aux fruits et aux herbes. Enfin, cette année Herbapol a absorbé une unité de production à Pruszków, en apportant un potentiel d’export très intéressant vers la Russie, les pays de l’ex URSS et l’Ukraine.

– Pologne : Comment voyez-vous la Pologne dans 10 à 20ans ?
Les Polonais sont créatifs et pleins de ressources. Cette caractéristique, associée à l’investissement dans l’innovation, peut devenir la force du pays dans un monde de plus en plus concurrentiel.

 

Retrouvez l’intégralité du dossier « La Pologne, bastion anti-crise de l’U.E. ? » en cliquant ici

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