Ce vendredi à Varsovie, sirènes et cloches des églises ont retenti afin de marquer le début de la cérémonie du souvenir de l’Insurrection, devant le mémorial aux héros du Ghetto de Varsovie. Bronislaw Komorowski, Président, Martin Schulz, le président du Parlement Européen et Shai Piron, le ministre israélien de l’Education, les témoins de l’Holocauste et plusieurs centaines de personnes se sont réunis pour célébrer le 70e anniversaire de l’insurrection, et également inaugurer le Musée de l’histoire des Juifs Polonais.

Le Ghetto de Varsovie :

A la suite de la signature du pacte germano-soviétique (Molotov-Ribbentrop) en 1939, l’occupation de la Pologne par l’Allemagne nazie a entrainé l’instauration par cette dernière, en octobre 1940, du Ghetto de Varsovie.

Le Ghetto de Varsovie renfermait cinq cent mille Juifs, dont plusieurs milliers sont décédés de faim et à la suite d’épidémies. A partir de l’été 1942, la Gestapo conduisait tous les jours des milliers de personnes à destination de Treblinka. La population a cru un temps aux mensonges des SS concernant les camps de concentration et d’extermination nazi, mais quand la vérité sur Treblinka a percé dans le Ghetto de Vars1942264988ovie, une insurrection a éclaté.

 Il y a soixante-dix ans, le 19 avril 1943, les derniers Juifs du Ghetto de Varsovie se soulèvent. Bien que sans espoir de victoire, ils parviennent à tenir tête aux soldats allemands pendant sept semaines et ainsi à témoigner, clamer au monde, inciter d’autres opprimés à agir de même, ce qui a lieu dans d’autres ghettos instaurés par les nazis sur des territoires occupés. C’est la première insurrection d’une ville dans l’Europe occupée et une manifestation éclatante de la résistance. C’est l’une des pages les plus héroïques de la grande lutte de l’humanité contre le nazisme.

La première fois que les cloches des églises carillonnent :

Depuis plusieurs jours et jusqu’au 16 mai, de nombreuses manifestations célèbrent le soixante-dixième anniversaire du lancement de l’Insurrection du Ghetto. Des centaines de volontaires distribuent dans les rues des jonquilles en papier, en souvenir de Marek Edelman, le dernier commandant du soulèvement juif, décédé en 2009, qui déposait chaque année un bouquet de ces fleurs jaunes au pied du mémorial d’Umschlagplatz. Dans le centre de Varsovie une projection de photos, commandées et réalisées à l’époque par les nazis, revient sur la vie quotidienne du ghetto. L’original du rapport concernant la liquidation du Ghetto en mai 1943, adressé par le commandant allemand du ghetto SS Jürgen Stroop à Heinrich Himmler, est présenté par l’Institut polonais de la mémoire nationale IPN.

A la synagogue Nozyk, une cérémonie en hommage aux insurgés et également aux Polonais ayant sauvé des Juifs pendant l’Holocauste, a eu lieu jeudi. Le soir même, un concert à l’Opéra National de Varsovie est donné par l’Orchestre Philharmonique d’Israël sous la direction de Zubin Mehta. Il est suivi d’une cérémonie judaïque de commémoration devant le mémorial aux héros du Ghetto. 

Lors de la cérémonie du vendredi qui s’est déroulée devant le mémorial aux héros du Ghetto, le président Bronislaw Komorowski a rappelé : « Aucune capitale en Europe n’a été détruite au même point que Varsovie, transformée en amas de ruines, car aucune n’a lutté trois fois contre l’envahisseur, en 1939, en 1943 et en 1944 ». Il a rappelé la souffrance endurée par les Polonais, par les Juifs. Il a souligné que « le drame des Juifs est particulièrement effrayant au vu de l’étendue des atrocités ». Cette cérémonie a été honorée par la présence de l’un des derniers combattants de l’Insurrection du ghetto, âgé aujourd’hui de 89 ans, Simcha « Kazik » Rotem. Le président polonais l’a décoré d’une haute distinction polonaise.
Dimanche, une «chaîne vivante du souvenir» est constituée retraçant les contours de l’ancien ghetto. 

Jusqu’à présent, les sirènes marquaient traditionnellement les cérémonies de l’Insurrection de Varsovie (1er août 1944) lancée par la résistance polonaise contre les nazis. La date du 19 avril 2013 marque la première fois où les cloches des églises ont carillonné à l’occasion de l’Anniversaire de l’Insurrection du Ghetto de Varsovie.

Musée de d’Histoire des Juifs Polonais :

«L’histoire du Ghetto de Varsovie, c’est l’histoire de notre ville et celle de notre pays»  a déclaré Hanna Gronkiewicz-Waltz, le maire de Varsovie.  Ce vendredi, c’était aussi l’inauguration d’un grand musée d’Histoire des Juifs Polonais. Il vient d’ouvrir ses portes ce même vendredi sur le site de l’ancien Ghetto de Varsovie, pour témoigner d’une coexistence millénaire complexe entre Juifs et Polonais.

Son bâtiment ultramoderne a été dessiné par deux architectes finlandais, Rainer Mahlamaeki et Ilmar Lahdelma. Sa façade en verre est frappée d’une déchirure symbolique, s’ouvrant sur des parois ondulées dans une allusion à la traversée biblique de la mer Rouge par les Juifs que Moïse conduisit d’Egypte en Israël.

« Notre objectif, c’est éduquer. Le musée est appelé à devenir un grand centre d’animation culturelle », assure son directeur Andrzej Cudak. L’exposition principale sera achevée en 2014. Mais l’agenda déborde déjà de rencontres théâtrales, cinématographiques, musicales et scientifiques, débats et ateliers qui débutent ce 20 avril.

Enfin, Gazeta Wyborcza cite pour l’occasion un poème de Władysław Broniewski :

« Que ceci soit gravé pour toujours dans la tradition polonaise comme dans le granit :
Notre maison commune a été piétinée ; nous avons été confrontés à un ennemi commun,
Auschwitz et Dachau nous unissent, comme chaque exécution de rue,
Comme les barreaux de chaque prison, comme chaque lieu de sépulture resté sans nom. »

Anna D-S

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